dimanche 12 septembre 2010

Silence, on sue

Par Elodie

Voilà presque un mois que nous sommes rentrés à Beyrouth et que vous vous interrogez peut-être sur notre silence. Nous avons tout simplement replongé dans la chaleur : humide, moite, écrasante… Je dois avouer, au-delà de 35°C ça me coupe le sifflet. Souvent pourtant, j’ai pensé à des billets pour Chouei Chouei : en voyant l’avancée des travaux du futur immeuble d’à côté; l'air franchement gêné de notre pharmacien lorsque j’ai voulu lui rapporter nos médicaments périmés et qu’il a dû m’expliquer qu’il n’y avait aucune collecte pour ça au Liban; notre surprise le jour où on s’est retrouvés par hasard nez à nez avec des courses de baudet au milieu de la route à Qartaba ; ou encore quand nous avons expérimenté les démarches et tractations à la libanaise en cas d’accident de voiture, qui plus est avec un véhicule de location, etc.


J’imaginais avec joie et malice ce que je pourrais écrire. Mais une fois dans mon bureau mon courage me quittait à mesure que le thermomètre grimpait. En résumé, silence on sue.
Heureusement, certains supportent la chaleur mieux que moi. Notre frangipanier par exemple a adoré la canicule !


Je vous laisse sur deux petites photos. Beyrouth vue de loin (ici depuis les hauteurs de Zouq Mickael), une image que j’essaie d’attraper sans succès depuis des mois. Ce n’est pas fameux, mais je n’arriverai probablement pas à faire mieux pour l’instant.



Et la mer de nuages qui recouvre au coucher du soleil la vallée de la Qadisha, vue depuis les hauteurs de la Qornet al Saouda (la pointe noire), le sommet le plus élevé du Liban qui culmine à un peu plus de 3000 mètres d’altitude.

vendredi 20 août 2010

Beyrouth ne s'arrête donc jamais de tourner !

Par Julien

Retour à tous les étages : sur le blog, à Beyrouth, à case (re-)départ. Et pour cause : je n'avais pas pu (ou su ou pris le temps d') écrire de billets ces derniers temps, étant embarqué sur une déferlante de boulot et de paramètres d'une ahurissante profusion. Soit.

Veni, vidi, d'accord, mais vici, ? là, je ne sais pas. Nous sommes arrivés mardi soir, dans le noir, dans un ville ébouillantée par les UV, sous cloche avec une haleine d'enfer, dans un quartier (le nôtre) méconnaissable, parce que métamorphosé. Ils avaient abattu le caroubier, disait Elodie avant de partir en vacances : je dirai même qu'ils ont depuis dégommé l'immeuble voisin !

Eh oui : Beyrouth l'été, quoi qu'on en pense, ce n'est pas nécessairement la meilleure saison, mais la vie continue ! Comme on disait autrefois "et pourtant, elle tourne", c'est un peu la même rengaine. Il fait extrêmement chaud, les coupures d'électricité se multiplient, les plages sont bondées (bien que privées et hors de prix), mais on avance. Et Beyrouth continue de pousser, de repousser, de raser, de construire et de reconstruire sans se retourner.

Hier : 39 degrés à midi. J'avais le nez sec comme un cornflakes et le dos moite comme le verso d'une anguille, c'est dire, ce qui n'a pas empêché les grues de tourner comme des girouettes, les marteaux-piqueurs de cogner, et les routes de se laisser embouteiller. Je ne sais pas si tout va pour le mieux dans le meilleur du monde, mais tout va, parce qu'il le faut bien. Beyrouth est une vielle entêtée et entêtante.

P.S. : De nouveaux venus sur le blog ci-dessous : de quoi partage,r si l'envie vous en prend, vos impressions !

jeudi 29 juillet 2010

Chouei chouei en vacances

Par Elodie

Loin des klaxons beyrouthins, des foules grouillantes de "Georges", et de nos amis ventilateurs, nous prenons une petite parenthèse de quelques semaines.

Rassurez-vous, on a déjà plein de chouei chouei idées en tête, mais en attendant de retrouver notre ordinateur et notre stock de photos, on vous laisse expérimenter les recettes mises en ligne ces derniers temps et surtout profiter de l'été.

A bientôt !

mardi 20 juillet 2010

Cuisine estivale (2) : les desserts !

Par Elodie

Un seul billet aurait été trop court pour aborder à la fois le salé et le sucré. Heureusement, la cuisine estivale ne se limite pas au tabboulé. Voici donc la suite ! Avec la chaleur, difficile de céder aux sirènes des douceurs libanaises. Osmallié, atayef-bil-achta, sfouf… Autant de douceurs libanaises formidables, mais bien trop lourdes et trop sucrées pour être dégustées en été, à mon goût. Evidemment, il y a les glaces, qui sont il faut avouer excellentes ici. Mais lorsque les coupures d’électricité viennent assiéger les frigos et congélateurs plusieurs heures par jour, cela devient compliqué. Il nous reste donc les fruits et toutes les variantes qui vont avec.

Sauf que l’été a commencé en mai au Liban : la saison des abricots est donc déjà passée. En juillet, il nous reste les pêches, les melons et les pastèques, quelques prunes et les cerises. Enormes et toutes noires, ces dernières viennent directement des montagnes libanaises où elles sont cultivées en moyenne et basse altitude, par exemple à Niha ou à Tannourine.


Voilà l’occasion de revisiter un bon vieux classique : le clafouti. Ca n’a rien de libanais, je vous l’accorde. Mais personnellement, je ne m’en suis jamais lassée depuis l’expérience fondatrice réalisée en maternelle (si, si, c’est vrai : premier clafouti réalisé en dernière année de maternelle grâce à Mme Guindon…).

Une quinzaine de minutes de préparation et le tour est joué. Evidemment, on laisse les noyaux des cerises car ça va beaucoup plus vite, et surtout parce que cela donne au clafouti un goût plus prononcé. Dernier avantage : on est obligés de le savourer tout doucement pour éviter d’avaler les noyaux. Pour ceux qui n’aiment pas les cerises, on peut essayer avec des prunes rouges, sans les noyaux cette fois.




Clafouti aux cerises
100 g de farine
80 g de sucre en poudre
6 œufs
25 cl de lait
750 g de cerises noires
1c. à c de kirsch
Sel

Mélanger la farine avec les œufs entiers et du sel. Ajouter un peu de lait. Bien travailler la pâte pour la rendre légère. Incorporer peu à peu le reste du lait. La pâte doit avoir la consistance de la pâte à crêpes. Ajouter alors les cerises noires lavées, équeutées et le kirsch. Verser la pâte dans un plat allant vau four et faire cuire à four chaud pendant 35 min. Saupoudrer de sucre. Servir froid.

Si vous ne pouvez vraiment pas vous retenir avec l’odeur délicieuse qui viendra forcément vous titiller le nez, vous pouvez aussi goûter chaud. C’est différent, mais très bon aussi !)

dimanche 18 juillet 2010

Cuisine estivale : vive le tabboulé !

Par Elodie

Avec le thermomètre rivé entre 30 et 35°C, plus question de s’attaquer à un plat de pâtes ou à un steak-frites. Heureusement, la cuisine libanaise recèle de nombreuses solutions pour rassasier les gourmands sans risquer le coup de chaleur inévitable qui suit un repas chaud. Hommos, moutabbal, fattouche… et bien sûr le tabboulé. Le vrai, le tabboulé libanais. Il s’agit en fait d’une salade composée pour l’essentiel de persil frais haché le plus finement possible.
En général, les femmes le préparent à plusieurs et passent de longs moments à discuter en triant le persil. Pour un cuisinier solitaire, il faut donc s’armer de patience mais le résultat en vaut la peine. Précision importante, le tabboulé se consomme très frais car le persil tourne rapidement avec la chaleur. En clair, en été on évite ou on s’autorise à le déguster seulement dans les rares restaurants dont la qualité et la fraicheur sont garanties. Pour ceux qui, comme moi, restent persuadés qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, voici une recette pour expérimenter le tabboulé, version libanaise.



Pour 6 personnes :
3 tomates (dans l’idéal, on choisit les vraies tomates libanaises, énormes et biscornues mais très douces)
3 cébettes
ou petits oignons nouveaux
3 bouquets de persil plat (attention, au Liban les bouquets de persil sont aussi énormes : multiplier les doses de persil par trois en France)
1 bouquet de menthe
2 cuillères à soupe de bourghol fin
15 cl de jus de citron (3 citrons)
10 cl d’huile d’olive
Sel


Laver le persil et la menthe, les faire sécher sur une serviette en tissu.
Hacher finement les cébettes. Couper les tomates en petits dés.
Réunir le persil en bouquets de manière à séparer les tiges des feuilles. Ciseler au couteau les feuilles le plus finement possible.
Mettre le bourghol fin dans un grand saladier. Ajouter les cébettes, les tomates, le persil, le jus de citron, l’huile d’olive et du sel.
Effeuiller la menthe et l’émincer. L’ajouter à la fin pour éviter qu’elle noircisse.
Mélanger longuement puis servir, en accompagnant le plat de feuilles de laitue romaine ou de chou libanais. Vous pouvez préparer cette salade à l’avance et l’assaisonner au dernier moment.

lundi 12 juillet 2010

Ils ont coupé le caroubier

Par Elodie

Je l’aimais bien, le grand caroubier du bout de la rue. Avec ses cinq mètres de hauteur, ses branches tellement immenses et étendues qu’elles pouvaient laisser penser qu’il y avait plusieurs arbres, il nous protégeait. Dans la sensation que je n’en avais au moins, je me sentais à l’abri, chez nous.



Au départ, il m’a intriguée car je ne connaissais pas cet arbre méditerranéen. Maintenant qu’il n’est plus là, c’est comme si notre rue n’était plus notre rue. Pendant deux jours, je l’ai entendu résister aux assauts cruels de la tronçonneuse. Il grinçait, gémissait, hurlait. Et les gens du quartier, descendus dans la rue pour l’occasion malgré le soleil de plomb, regardaient en silence. Mais voilà, les terrains valent de l’or et la spéculation immobilière s’emballe à Beyrouth.


L’immeuble voisin de celui où nous habitons, assez endommagé par la guerre et officiellement inhabité depuis, a été vendu il y a quelques semaines. Il appartenait au même propriétaire que le nôtre qui a profité d’une visite à Beyrouth pour conclure l’affaire. En réalité, je m’en fichais un peu malgré le bruit des travaux de rénovation aussitôt commencés. Après tout, c’était dommage ce joli petit immeuble de trois étages inutilisé. Je ne pensais pas qu’ils oseraient toucher au caroubier.

mercredi 30 juin 2010

Recyclage créatif

Par Elodie

Je n’ai pas pu m’empêcher de m’arrêter devant ce formidable panneau d’indication, lors d’une balade sur la route de Qartaba dans le caza de Jbeil. Personnellement, j’aurais ajouté juste un peu de couleur, mais là je dois avouer : côté recyclage créatif, ils sont trop forts !


Dommage que je n’aie pas un stock de pots d’échappement aussi conséquent que ma collection de bonbonnes d’eau

lundi 28 juin 2010

Où sont passés les Beyrouthins ?

Par Elodie

Avec l’été, les touristes ont commencé à affluer : on ne compte plus les voitures de sport et les gros 4x4 dotés de plaques vertes (signe distinctif des voitures de location au Liban) ou immatriculés dans les Emirats. Une année record pour le tourisme est annoncée, ce qui va signifier pour les Beyrouthins une montée en flèche des prix et des embouteillages monstres pour les deux mois à venir.
L’école étant terminée pour les enfants, beaucoup ont déjà pris leurs jambes à leur cou : le week-end en particulier les quartiers résidentiels de Beyrouth sont désertés ! Mais où sont-ils donc passés ?


La réponse est simple : sur la route de Jounieh ! L’autoroute du nord, qui mène vers les plages et la montagne, est très fréquentée toute l’année mais elle est passée en mode été. Des heures à attendre dans la chaleur pour passer les quelques kilomètres critiques si on s’y retrouve à la mauvaise heure, c’est-à-dire à partir de 10h du matin.


En même temps l'avantage, c'est qu'on trouve tout sur l'autoroute au Liban. Vous avez faim ? Pas de souci, le vendeur de kaak est là... et il a même pensé à prendre un stock de barbe à papa !


Maalech’ (*), de toute façon on n’a qu’à rouler la porte ouverte avec la radio à fond : c’est tellement pratique pour draguer les filles !


(*)En français : c'est pas grave...

jeudi 24 juin 2010

Surprise matinale

Par Elodie

C’est une petite bête qui monte, qui monte, qui monte… Et cela s’appelle un thermomètre ! Depuis quelques semaines, nous avons redécouvert ce que signifie l’arrivée de l’été ici. 7h du matin : 30°C. 9h : 32°. 11h : 34°C. 13h : … Non, j’y arrive plus : à ce stade c’est la sieste obligatoire.

Hier matin pourtant l’ambiance était différente, les oiseaux chantaient. Comme s’ils avaient oublié qu’il vaut mieux s’économise avant d’être encore écrasé par la chaleur. La surprise ! Cela n’a duré que quelques minutes, mais il a plu. C’est beau le goudron mouillé… Juste le temps de le voir et tout s’évapore, comme si de rien n’était.

Cela pourrait paraître banal, mais le fait est exceptionnel au Liban à cette saison. Les précipitations moyennes sont quasiment nulles en juin, juillet, août et reprennent à peine en septembre. C’est donc le monde à l’envers, ou plutôt les nuages là où ils ne devraient pas être.

C’est drôle, je venais justement de terminer un roman sympathique de Stéphane Audeguy, intitulé La théorie des nuages. A conseiller à ceux qui seraient en manque de nuages, à ceux qui n’en peuvent plus d’en voir trop, ou à tous ceux qui auraient envie de les voir autrement. Et à tous ceux qui aiment le roman tout court, puisqu’il faut bien avouer que cela ne parle pas que des nuages.

Je me suis demandé un moment si à force d’y penser, je n’ai pas imaginé ces nuages et ces quelques gouttes d’eau. Un peu comme un mirage d’oasis au milieu du désert. Ce matin, je n’en croyais toujours pas mes oreilles : il a plu à nouveau ! Et voilà que les nuages venaient en plus nous donner un peu de fraîcheur. Cette fois-ci, je n’ai pas rêvé. 28°C, le grand bonheur.

J’ai sauté sur le site de la météo pour voir si cette révolution climatique allait perdurer, mais il ne faudrait pas trop rêver. Le niveau de précipitations annoncé reste désespérément scotché au zéro pour les jours à venir. Heureusement, le meilleur ami de l'homme par cette saison s'appelle le ventilateur.

mercredi 16 juin 2010

Allo ? Couic !

Par Elodie

Un vent de révolte souffle sur la blogosphère libanaise et les réseaux sociaux depuis plusieurs jours. Non, nous ne manquons pas de pain. Non, les boîtes de nuit n’ont pas été fermées. Non, les retransmissions (obtenues au passage grâce à une somme faramineuse, de 800 000 $, déboursée par le gouvernement libanais) des matchs de foot de la coupe du monde n’ont pas été interrompues.

Que diable leur prend-il, me direz-vous ? Le gouvernement libanais a adopté récemment une nouvelle loi interdisant l’utilisation de la VoIP. En clair, plus question d’utiliser Skype et ses équivalents, qui permettent de contourner les prix exorbitants des opérateurs téléphoniques locaux.

Alors, on oublie le classique : « Allo maman ? Tu pourrais me donner ta recette-magique-secrète-inégalable de lasagnes s’il te plaît ? Oui, c’est urgent, mes amies arrivent dans 1h et j’ai rien commencé… »

Il faut préciser que ceci n’est pas une fiction. (N’est-ce-pas Miss V. ?) La diaspora libanaise étant très importante, de nombreuses familles sont dispersées entre le Liban, la France, l’Amérique du Nord, l’Australie, etc.
Mais au fait, les règles ne sont-elles pas, ici, faites justement pour être contournées ?

Pour une fois, c’est devenu mission quasi impossible : un logiciel de filtrage a été activé et bloque automatiquement les utilisateurs en leur envoyant un message du ministère des télécommunications. Heureusement, il suffit d’avoir un compte enregistré dans un autre pays, par exemple en France, pour y échapper. Il semblerait en effet que le ciblage par adresse IP (ce code qui indique l’endroit d’où vous vous connectez) dudit logiciel ne soit pas extrêmement précis. Ouf, pas besoin - pour l’instant - de recourir au pigeon voyageur !

vendredi 4 juin 2010

Sur les routes libanaises

Par Elodie

Conduire sur les routes libanaises est une aventure. Un seul billet ne saurait d’ailleurs épuiser ce sujet sans fin. Il suffit de faire un petit tour sur Youtube, pour être saisi de frayeur, pleurer de rage, ou exploser de rire, selon votre humeur et votre vision du problème.

Allez, pour le plaisir, c’est un peu gnangnan je vous le concède, mais tellement vrai !



Je vous assure, il y en a que ça fait marrer.



Je croyais m’être habituée, avoir tout vu en quelques sortes. J’ai en effet appris à ne plus ciller lorsque nous sommes doublés sur la droite, lorsqu’on se rabat ensuite sur nous sans clignotant, lorsqu’on croise une voiture en contresens sur une bretelle d’accès d’autoroute, et bien sûr à répondre aux coups de klaxon par un simple lever de sourcil. Il faut avouer que les Libanais vouent un véritable (z)amour (c’est justement comme ça que ça s’appelle en arabe) à leurs klaxons.



Pourtant, je n’avais encore jamais vu… un cycliste - en tenue de compét - sur l’autoroute. Entre les voitures, les piétons et les vendeurs de bananes, installés comme d’habitude sur la bande d’arrêt d’urgence.



Et pour vous faire sourire, une image plus amusante, également prise sur l’autoroute de la côte le weekend dernier. Oui, on peut prendre l’autoroute en scooter sans abîmer son brushing et sa tenue : il suffit de ne pas mettre de casque (qui porte ces horreurs de toute façon ?), et de chevaucher la bête en amazone derrière son prince.

mercredi 2 juin 2010

La question taboue

Par Elodie

Depuis quelques semaines, on peut voir le long des routes libanaises des affiches qui ne montrent pas une sirène en maillot de bain, mais deux femmes ne faisant qu’une. Il s’agit de la deuxième campagne de sensibilisation aux droits des travailleuses immigrées, en clair des bonnes, lancée par Caritas Liban.
L’affiche et le spot télévisé, qui se veulent choquants, détaillent les conditions de travail de ces employées de maison (« elle travaille 16 heures par jour, n’est pas payée toutes les fins de mois, travaille 7 jours sur 7, est parfois battue et travaille même lorsqu’elle est souffrante »), face à celles de femmes libanaises. La comparaison aboutissant à une question : «Accepteriez-vous ces conditions pour une travailleuse libanaise?»



La campagne est osée car le sujet est quasiment inabordable, même avec des amis proches ou des voisins libanais, à moins d'avoir envie de faire tourner une soirée au pugilat verbal. En témoignent les groupes créés sur Facebook sur cette question.

Originaires d’Asie (Philippines, Sri Lanka, etc.) ou d’Afrique (Ethiopie notamment), ces employées de maison seraient au nombre de 200 000 au Liban, selon Human Rights Watch qui dénonce régulièrement leurs conditions de travail. Le débat – cette question est très sensible ici - a été soulevé de longue date, en particulier par un documentaire réalisé par Dominique Torrès et diffusé sur France 2 en 2007, qui avait généré une véritable polémique.

La situation serait-elle en train de bouger, au moins un tout petit peu ? Le ministre du Travail libanais a annoncé hier la création d'un bureau de plaintes (avec un numéro vert et des formulaires qui une fois remplis devront être renvoyés par la poste) et la publication d'un guide d'orientation, traduit en 14 langues, destiné aux employés de maison étrangers.

En attendant, on continue à voir les bonnes briquer tous les matins (à l'heure du petit déjeuner, vers 7h) les rambardes des balcons des immeubles voisins. Du reste de leur vie quotidienne, nous ne saurons rien. Si ce n'est ce que montrent les plans des appartements de luxe où l’emplacement des chambres de bonnes est presque toujours similaire : quelques mètres carrés, souvent sans fenêtre, entre la cuisine et la buanderie.

mardi 1 juin 2010

L’odeur de l’été

Par Elodie

Plus de doute, nous voici plongés dans l’été. Le thermomètre flirte quotidiennement avec la barre des 30°, mais ce n’est pourtant pas cela qui m’en a convaincue. Il faut avouer que la météo est devenue tout à fait inutile depuis quelques semaines. Les parapluies peuvent de toute façon être remisés au fond des placards : nous n’aurons sans doute plus aucune pluie avant le mois de septembre, ou même d’octobre.

C’est avec l’odeur forte, sensuelle, presque écœurante des fleurs de gardénia que j’ai réalisé que l’été s’était installé. Enfilées comme des perles sur des bouts de ficelle, elles sont vendues en colliers pour une poignée de livres libanaises par des marchands ambulants, aux carrefours ou dans les rues. Les automobilistes, en particulier les chauffeurs de taxi, les accrochent au rétroviseur intérieur de leur voiture. Parfois même, les chauffeurs les gardent à la main, pour saisir à chaque ralentissement l’occasion de s’enivrer de l’odeur forte exhalée par les fleurs.



En arrivant au Liban, j’avais lu dans un ouvrage de Nadia Khouri-Dagher, une description émouvante de cette odeur. C’était l’hiver, je n’y avais pas prêté attention. L’odeur du gardénia, j’ai eu depuis le temps de m’en rendre compte, est bien celle de Beyrouth l’été. Il fait chaud, les automobilistes ont perdu le peu de patience qui leur restait, ils font rugir moteur et klaxons. La ville écrasée sent le mazout, mais les chauffeurs sont protégés. Le nez dans les fleurs, ils regardent les jolies filles. Hum, ça sent l’été !

dimanche 9 mai 2010

Petite promenade électorale

Par Elodie et Julien

Quelques photos, glanées au cours d'une escapade dominicale. De quoi herboriser sur un air de partie de campagne (pour des municipales).


Iconographie des affiches couleur locale.


Ou encore...


Non loin de la Place Sassine, sur les poteaux, affiches toujours, partout.


En tout cas, les élections, c'est aussi un jour de fête.


Des ribambelles de partisans distribuent des tracts aux conducteurs, à deux pas d'un bureau de vote, à Achrafieh.


Fanaux et autres drapeaux à l'occasion de la Coupe du monde de foot, ces derniers temps, ont un peu brouillé les pistes, disputant aux affiches électorales le monopole du coeur des Libanais.


L'hyperpolitisation de l'espace n'empêche guère, par endroits (question de susceptibilités variables selon les quartiers, tout ne peut pas se montrer comme ça n'importe où), la persistance de fenêtres pour dilettantes et autres encouragements à l'indolence qui semblent suggérer au passant : "allez, tout ira bien, tu as raison, le plus important, c'est ça, c'est là, l'été sera chaud".

Y'a pas que les mezzés dans la vie (mais quand même)

Par Julien

Il n'y a pas que la Grèce qui remue ou le Royaume-Uni qui s'agite. Le Liban aussi, à sa façon. D'ailleurs, dans un pays où tout est, peu ou prou politisé, rien n'est anodin. Le printemps a beau flamboyer paisiblement, difficile d'échapper aux murmures indélicats et tensions de toutes sortes qui caractérisent la région (au sens large).

Beyrouth est particulièrement calme depuis hier soir. Les restaurants et débits de boissons ont dû fermer plus tôt cette nuit. Check-points militaires aléatoires, ici et là, pour prévenir tout débordement partisan. Le Liban, méfiant à l'égard de tout à commencer par sa propre justice, reste susceptible de mouvements d'humeur et de sursauts de violences, comme l'a démontré un fait divers odieux dans le village de Ketermaya (dont l'histoire est admirablement résumée par cet article de Pierre Haski sur Rue89).

Les élections municipales au Liban (où l'on vote pour les "moukhtars") se déroulent sur quatre semaines. Et aujourd'hui, comme l'explique le quotidien l'Orient Le Jour sur son site Internet, "près d'un million d'inscrits sont appelés à se rendre aux urnes [aujourd'hui] pour la deuxième phase des élections municipales, prévues cette fois-ci à Beyrouth (450 000 inscrits) et dans la Békaa (550 000)."]

Tout ceci n'empêche pas le Liban d'avoir envie de "persévérer dans son être" malgré les doutes ou les intimidations, pour reprendre une formule de Spinoza. Et comme toujours, il y a la politique, le lieu commun des hommes sérieux, et il y a le maquis des symboles, le grand n'importe-quoi qui l'emporte, le "pourquoi pas" cher aux Libanais. C'est ainsi que la guerre du hommos a repris. Voyez plutôt, admirez :



Vous n'êtes plus sans savoir, grâce aux chouei-chouei billets humblements dispersés sur la Toile avec ce modeste blog, que Libanais et Israéliens se disputent la paternité de ce mezzé succulent (à base de pois chiches et de téhiné) dont l'existence transfrontalière, entre parenthèses, me fait plus penser à un trait d'union culturel et gastronomique entre voisins orientaux fâchés qu'à la preuve par le fait que rien ne les rassemble. Ce n'est qu'une hypothèse, mais elle tient la route. Bref : les cuisiniers impliqués dans la préparation de mezzé surréaliste n'ont pas lésiné sur les moyens : "Les "chefs" ont mélangé sept tonnes de pois chiches, deux tonnes de téhini (pâte crémeuse à base de graines de sésame), en utilisant deux tonnes de citron et 700 kg de bouteilles d'huile d'olive dans un plat gigantesque qui, au passage, a remporté aussi le record du plus grand plat en terre cuite.", dixit, toujours, le quotidien francophone. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour se faire remarquer ?

Pour réconcilier tout le monde et apaiser les esprits, rien ne vaut le détour par une chanson de Fairouz, fièreté s'il en est de la musique libanaise :

mercredi 5 mai 2010

Bouteilles, recyclage et étagères

Par Elodie

Au Liban, deux systèmes d’approvisionnement en eau cohabitent : l’eau du réseau officiel et l’eau qui provient des citernes installées sur les toits des immeubles. Il y a donc deux robinets dans toutes les cuisines, même si celui du réseau officiel ne fonctionne que très rarement. De toute façon, aucun ne distribue de l’eau potable propre à la consommation immédiate. Il est donc (fortement) recommandé de la faire bouillir ou de consommer de l’eau minérale.

Dans un pays plombé par la chaleur quatre à six mois dans l’année, les eaux en bouteilles représentent un business considérable. Et une source de déchets en plastique énorme. Avez-vous déjà calculé le nombre de bouteilles en plastiques que vous consommez par an ?

A raison de 3 litres d’eau par jour en moyenne, vous consommez au minimum 1095 litres par an, soit plus de 182 bonbonnes de 6 litres. Est-il possible de supporter l’idée que cette guirlande géante de plastique aille orner la superbe montagne de déchets de Saïda, ou l’une de ses cousines, pour s’étaler ensuite dans les fonds marins et rejoindre peut-être les côtes turques, chypriotes ou grecques ?

Deux centres de tri des déchets et de recyclage ont certes été ouverts au début de l’année dans le Sud du Liban, mais lorsqu’on s’efforce d’alimenter les quelques bacs de récupération du verre ou des journaux qui existent à Beyrouth, les passants éclatent de rire. "Vous savez, ça sert à rien : quand le camion poubelle vient les prendre, ils les mélangent avec le reste des ordures…" La montagne a encore de l’avenir. En attendant, nos bouteilles d’eau s’entassent toujours. Mais alors, que faire ?


Puisque l’on peint les œufs, et même les poussins vivants comme j’avais pu le découvrir –médusée- sur les bords de l’autoroute lors du week-end de Pâques, pourquoi ne pourrait-on pas peindre nos chères bonbonnes pour les détourner de leur fonction première?


La solution est évidemment loin d’être parfaite, mais l’expérience peut amener un peu d’occupation (quoique nous n’en manquions pas, il est vrai) et d’humour dans votre salon. A vos pinceaux !

mercredi 28 avril 2010

Les joies de l'été

Par Elodie

Avril, le temps du printemps, des fleurs, des fraises, des fèves fraîches formant de jolies montagnes vertes sur les étals qui ponctuent les bords de l’autoroute. Le printemps, pourtant, semble déjà presque envolé, comme poussé dehors par l’été qui s’annonce précoce cette année. Il ne reste plus que quelques pans de neige sur les flancs de la Qornet-al-Saouda et de Sannine.

En bas, à Beyrouth, le thermomètre s’affole, les clims commencent à rugir et les coupures reviennent en masse. Hier par exemple : trois coupures dans une même journée. A peine commencé à faire quelque chose… Couic ! Comment voulez-vous qu’on s’y retrouve s’ils ne respectent même plus le planning des coupures ?

Heureusement que nous avons eu de la visite pour nous réconforter. En pleine forme, les antennes toutes frétillantes après plusieurs mois d’absence, Georges est venu nous saluer au pied du lit ce matin. On commençait à s’inquiéter de la survie de la famille blatta orientalis. Nous voilà rassurés. Après Malik le moustique, qui a débarqué depuis plusieurs semaines avec toute sa tribu, c’est Mimi la fourmi, la petite nouvelle que l'odeur des maamouls a fait rappliquer.

Formicidae, de la super-famille vespoidea, du sous-ordre apocrita, de l’infra-classe neoptera, de la sous-classe pterygata, de la classe insecta. Voilà, les présentations sont faites, la famille est désormais au complet. L’été peut s’avancer, il est attendu d’antenne ferme.

samedi 10 avril 2010

Un air de printemps (bis)

Par Julien

Le temps étant ce qu'il est, je dois bien composer. Il (me) déborde parfois ; je n'ai pas pu, ces derniers jours, contribuer directement à nourrir notre chouei-chouei carnet de voyage numérique. Mais je suis là, sur les photos que je prends parfois, dans les idées qui se trament et se retrouvent ensuite postées, sous la forme de billets, avec photos, ou commentaires, et tutti quanti.

Et là, à la lecture du dernier billet d'Elodie, me vient une parole. Un texte. Gide, et Les nourritures terrestres. Dans le quatrième livre, III, on peut lire ceci :

"Don du poète : celui d'être ému par des prunes.
(La fleur ne vaut pour moi que comme une promesse de fruit.)"

Le printemps est bleu, en ce moment, c'est la couleur dominante ; mais il est vert aussi, et chatoyant, parce que l'eau se transforme quand elle aboutit quelque part et irradie ce pays de montagnes situé, faut-il le rappeler, à la source du "croissant fertile" des géographes. De quoi le transformer, avec un peu d'imagination et/ou en avalant quelques kilomètres sur les petites routes de montagnes, en pays de Cocagne.

C'est sans doute pour cette raison que le printemps donne envie de dire que non, il n'existe pas de "rue privée". Si c'est une rue, on a le droit de passer. On a le droit de passer, sur ces montagnes. Et toc ! C'est quoi ce barouf, ce micmac, et tout ce tsouin-tsouin. On n'est pas sérieux, quand on pisse du dollar et qu'on s'installe comme ça, sur un sommet qui regarde la mer de loin, sans rien demander à qui que ce soit. Regardez-moi ça :



Voici ce que je vous propose : soyons fous, on s'en fout !

Que voulez-vous ? C'est pas moi qui le dit, c'est le printemps qui nous le raconte. Cavaler dans les vallées : y'a que ça de vrai. En route (pour la joie) !

vendredi 9 avril 2010

Un air de printemps


Par Elodie

Rassurez-vous, je ne vais pas vous refaire la chanson du printemps. De Bambi à Léo Ferré, le thème a déjà été surexploité, même s'il peut encore être exploré sans miévrerie comme l'a montré - avec talent - Emilie Simon.
De toute façon, il faudrait être bien ronchon pour ne pas l'apprécier au Liban. Il fait doux, pas encore trop chaud, et la nature est pleine de fleurs sauvages. Certaines vallées, comme celle de Nahr Ibrahim est par exemple tapissée de cyclamens sauvages, tandis que les vergers de montagne sont tout en fleurs. Il faut avouer : c'est magnifique. Pas étonnant que Khalil Gibran ait écrit un hymne à la fleur.






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dimanche 4 avril 2010

Joyeuses Pâques !

Par Elodie

Pâques est un moment de célébrations et de fête important pour les familles chrétiennes au Liban. A cette occasion, les femmes préparent des maamouls : petits gâteaux fourrés aux fruits secs qu’on offre ensuite à la famille, aux amis, aux connaissances qui viennent en visite le jour de Pâques. Toute la semaine précédente, elles s’activent - souvent à plusieurs, pour réaliser des montagnes de gâteaux. Certaines prennent même des jours de congé pour pouvoir le faire. Heureusement, pour les moins courageux, on en trouve aussi dans les pâtisseries. Les maamouls ne sont préparés qu’une fois par an, à la fin du carême. Dommage : ça rend moins malade que le chocolat et c’est délicieux !



Préparation : 3 heures
Repos de la pâte : 1 nuit + 2h
Cuisson : 10 minutes par fournée

Pour 50 petites pièces
Pour la pâte :
250 g de semoule fine
250 g de semoule moyenne
200 g de beurre
2 cuillères à soupe de mahlab (noyaux de faux merisiers moulus, aussi appelé prunus mahaleb ou bois de Sainte-Lucie)
5 cl d’eau de fleurs d’oranger
5 cl d’eau de rose
Du sucre glace

Pour la farce :
125 g de noix concassées
125 g de pistaches décortiquées non salées
125 g de dattes
1 noix de beurre
4 cuillères à soupe de sucre en poudre
2 cuillères à soupe d’eau de fleur d’oranger

La veille
Dans un saladier, mélanger les deux sortes de semoule, le mahlab et le beurre fondu ; couvrir d’un film alimentaire et réserver à température ambiante.

Le jour même
Préchauffer le four à 220°C (th.7-8).
Faire tiédir l’eau de fleur d’oran,ger et l’eau de rose. Les verser sur la semoule, mélnager jusqu’à obtenir une pâte homogène et laisser reposer 2h.
Préparer chaque farce séparément :
- Mélanger les noix concassées avec 2 cuillères à soupe de sucre et 1 cuillère à soupe d’eau de fleur d’oranger.
- Mélanger les pistaches concassées avec 2 cuillères à soupe de sucre et 1 cuillère à soupe d’eau de fleur d’oranger.
- Réduire les dattes en purée, les mélanger au beurre et les rouler en petites boulettes de 2 cm de diamètre.
Prendre dans la main une boulette de semoule, la creuser en l’aplatissant et la farcir de mélange aux noix, ou aux pistaches, ou aux dattes .
Presser la boulette dans le moule adéquat (allongé pour les pistaches, rond et conique pour les noix, rond mais aplati pour les dattes), puis la démouler d’un coup sec sur la table. Il faut la poser aussitôt sur la plaque allant au four.
Cuire 10 min à mi-hauteur du four, à chaleur tournante si possible.
Saupoudrer ensuite de sucre glace.


NB : si vous ne disposez pas des moules en bois spécifiques aux maamouls, vous pouvez quand même préparer ces gâteaux : préparez les boulettes farcies, puis les façonner à l’aide d’une pince à épiler (ou d'un autre instrument qui peut faire l'affaire : couteau, fourchette, etc.) pour leur donner un aspect strié.

NB 2 : si vous manquez de temps, vous pouvez aussi choisir de ne faire qu'un type de farce. En vce cas, je conseillerais les maamouls aux pistaches (fisto halabi)...